Taux proportionnel : Le cadeau de la LDF 2022

La loi de finance 2022 apporte un « beau cadeau » aux entreprises soumises à l’IS : Le retour du Taux proportionnel. Cette mesure est applicable sur les bénéfices des exercices ouverts à partir du 1er Janvier 2022. En effet, avant la loi de finance 2022, l’article 19 du CGI stipulait que les bénéfices des entreprises soumises à l’I.S est calculé selon un barème progressif. La loi de finance 2022 revient sur le principe de progressivité et instaure dorénavant un barème proportionnel.

Taux proportionnel VS Taux progressif

En vertu de la loi de finance 2022, les taux progressifs institués par la LF 2018 ont été remplacés par des taux
proportionnels. Cette loi maintient les taux du barème qui était en vigueur comme suit :

Quelle est la différence entre un taux progressif et un taux proportionnel ?

Taux progressif

Le taux progressif permet à une entreprise de bénéficier d’un taux réduit sur les tranches inférieures de son bénéfice. Ainsi, par exemple, une société qui réalise un bénéfice de 1.200.000 MAD sera taxée comme suit :

  • D’abord, un taux de 10% sera appliqué à la tranche inférieure à 300.000 MAD
  • Ensuite, un taux de 20% sera appliqué à la tranche se situant entre 300.000 MAD et 1.000.000 MAD
  • Enfin, le taux de 31% sera appliqué à la dernière tranche supérieure à 1.000.000 MAD

Cette entreprise devra, de ce fait, s’acquitter d’un I.S égal à 232.000 MAD.

De ce fait, le taux progressif est avantageux pour la fiscalité des entreprises qui réalisent des bénéfices importants. Cependant, il n’impacte pas les entreprises ayant des bénéfices inférieurs à 300 000 dirhams.

Elles payent dans les deux systèmes un taux de 10%.

Taux proportionnel

Le taux proportionnel consiste à appliquer au bénéfice de l’entreprise le taux de la tranche dans laquelle se situe son bénéfice net. Ainsi, dans le cas d’une entreprise qui réalise un bénéfice de 1.200.000 MAD, le taux applicable sera de 31%.

De ce fait, l’IS dû par cette entreprise sera de 372.000 MAD.

L’impact de l’application de la proportionnalité est de :

  • Une augmentation de l’I.S. d’un montant de 30.000 MAD pour les entreprises qui réalisent un bénéfice qui se situent entre 300.000 MAD et 1.000.000 MAD
  • Une augmentation de l’I.S. d’un montant de 140.000 MAD pour les entreprises réalisant des bénéfices de plus de 1.000.000 MAD.

Attention : La nouvelle disposition légale impose aux entreprises de calculer leurs acomptes pour l’exercice 2022 sur la base d’un taux proportionnel.

Quelle est la justification de cette mesure ?

Selon la note de présentation de la loi de finance 2022, cette mesure viserait à :

  • Assurer la convergence progressive vers un taux proportionnel unifié ;
  • Garantir la simplification de la structure des taux ;
  • Aligner notre système fiscal sur les meilleures pratiques internationales.

Pour rappel, l’instauration d’un taux progressif était une revendication de la CGEM à laquelle le gouvernement avait accédé en 2018. ça aura durée 4 ans.

Dans la note de présentation de la LDF 2018, le taux progressif viserait à « moduler l’application des taux d’I.S. en fonction des bénéfices nets réalisés par les sociétés ». Cette même note de présentation explique que cette instauration a suivi une « étude d’impact » !!

On a le droit de se demander qui a raison ? L’État en 2018 ou l’État en 2022?

Taux proportionnel quelques injustices

L’instauration d’un taux proportionnel est de nature à créer quelques situations injustes.

Ainsi, les sociétés ayant quelques milliers de dirhams de différences dans les bénéfices se verront appliquer des taux différents. En gros, une entreprise n’a pas intérêt à dépasser de peu le 1.000.000 MAD.

Exemple :

  • D’un côté de la tranche, une entreprise qui réalise un bénéfice avant impôt de 990.000 MAD paye à 20%, soit un bénéfice net de 792.000 MAD ;
  • De l’autre, une entreprise qui réalise un bénéfice avant impôts de 1.010.000 MAD paye à 31%, soit un bénéfice net de 696.900 MAD.

Dans cet exemple (volontairement extrême), un supplément de 20.000 MAD de bénéfice coûte 95.100 MAD en impôt.

Vous n’avez pas intérêt à tourner autour de la tranche (ou mieux faites un petit don le 31 décembre 😂😂).

Plus sérieusement, cette mesure ne favorise-t-elle pas la pratique de multiplication des entités juridiques?

Au-delà de la règle, une sécurité fiscale en danger

En matière fiscale, l’instabilité des normes a toujours été au cœur des critiques (partout dans le monde).

Dans un pays où l’on affiche une volonté d’attirer des investisseurs étrangers et encourager les locaux, la sécurité fiscale prend une place essentielle.

Le capital a besoin de se projeter dans le futur, d’établir des business plans, d’avoir de la visibilité.

Le changement permanent des règles fiscales n’est pas de nature à favoriser cette sécurité.

Si la critique de la stabilité peut être généralisée à plusieurs aspect de la loi fiscale, elle se touche du bout des doigts dans cette mesure en particulier.

On raconte l’histoire d’une absence de vision claire et les mesure d’encouragement perdent toute leur attractivité.

Schématiquement ici :

  • D’abord, on passe d’un taux proportionnel unique à un barème proportionnel en 2016 ;
  • Ensuite, on instaure le principe de progressivité en 2018 ;
  • Maintenant, on revient un pas en arrière vers le barème progressif ;
  • Et enfin, on nous explique que c’est en préparation d’un retour vers un taux proportionnel unifié.

Tout cela, dans le but de nous aligner sur les pratiques internationales.

N’a-t-on pas le droit, après cela, de nous demander jusqu’à quand la réduction de la cotisation minimale va durer ?

Je ne sais pas vous, mais moi je ne comprends plus !

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